Temps et relativité

 


 


 


   Au moyen âge, les seules heures qui rythmaient la vie des chrétiens s'appelaient matines ou vêpres (…) .

En gros, elles avaient des fonctions physiologiques (miam miam, dodo) , économiques (boulot , repos) et religieuses (à genoux, debout).

Aujourd’hui , il a poussé à nos poignets des montres qui débitent nos journées à la minute ou la seconde prés afin que nous soyons synchrones avec nos métros, nos contremaîtres ou nos programmes de télé .

Mais le temps dont nous avons besoin pour comprendre la véritable nature de l'univers , n'a rien à voir avec ce sinistre réveil qui égrène cruellement les heures de notre vie .

C'est de ce temps mystérieux que nous allons parler , maintenant .

 

 Les concepts liés au temps

 

Temps ou durée ? Quelle est la notion qui précède l'autre ?


 

On conçoit le temps comme une échelle graduée permettant de situer les événements et la durée comme un intervalle séparant deux événements sur cette échelle. Il semble donc qu’on définisse la durée à partir du temps. Mais à y regarder de plus prés, peut – on définir l’échelle sans fixer l’écartement de ses barreaux qui n’est pas autre chose qu’une durée ?

Cette première tentative de définir les concepts liés au temps avoue donc rapidement ses limites .On ne peut à la fois, définir le temps en fonction de la durée et la durée à partir du temps. Mais peut-on définir l’une de ces notions indépendamment de l’autre ?

 

Quand on se propose d’élaborer un système logique, il paraît naturel de commencer par les concepts dont la « charge conventionnelle » est la moins grande. . Or, il semble que la notion de durée soit cognitive , indépendante de toute convention,  inhérente à l’humanité (et sans doute à l’animalité), tandis que  l’établissement des calendriers ou la construction des horloges qui permettent de jalonner le temps sont des actes qui témoignent d’un certain degré d’organisation ou de civilisation.

A priori, il semble donc que , pour définir un temps , il faille d’abord percevoir la nécessité de mesurer les durées ne serait - ce que pour définir l’égalité des intervalles qui composent les barreaux de l’échelle .

 

Le problème est que le concept de durée est tellement basique, axiomatique dans notre perception de l'univers, qu'on a du mal à trouver les notions qui le précèdent pour étayer sa définition sans évoquer sa mesure. Et en se résignant à mesurer la durée, on la dote d'un statut aussi complexe que le temps.

 

Donc , pour l’instant , notre préoccupation est de produire des intervalles de temps égaux, en faisant semblant d'ignorer ce qu'est le temps et sans préjuger du fait que nous les utiliserons pour graduer une échelle ou pour mesurer des durées . Pour cela , on peut utiliser un étalon de durée reproductible et non périodique, par exemple le vidage d’un sablier mais un tel procédé avoue rapidement ses limites quand on change l’échelle des phénomènes à mesurer, alors que l’univers regorge de dispositifs périodiques  (depuis les vibrations de l’atome de césium jusqu’à la rotation des astres en passant par l’oscillation des pendules) qui facilitent les comparaisons et les rendent plus précises .

En outre , un dispositif périodique présente l’avantage de pouvoir être facilement converti en horloge (il suffit de compter ses périodes) ce qui résout comme par magie  le problème de la préséance entre la durée et le temps .

Le temps devient un nombre de périodes comptées à partir d'un instant initial, et il permet d’évaluer les durées par différence .

Mais un nouveau problème se pose : si la façon dont on définit la durée en fonction du temps et le temps à partir d’un dispositif périodique est très claire , comment faire pour définir un dispositif périodique indépendamment du temps et de la durée ?

 

Instants et périodes

 

Pour cela , il faut faire appel à une quatrième notion , indépendante du temps et de la durée : la notion d’instant .

Pour comprendre ce qu’est un instant , il faut d’abord admettre que la notion de temps est intimement liée au changement .

l Dans un univers figé , à un seul état , le temps n’a pas cours puisque l’avant et l’après n’existent pas .

l Dans un univers à deux états , il y a un avant et un après le changement d’état , mais le temps n’a pas plus de réalité puisque chacun des états n’a pas de durée propre (il est figé) et que les deux états sont séparés par une durée nulle .

         Pourtant , en dépit de l’absence de temps , on peut différentier les deux états en parlant de l’univers à l’instant t1 (avant le changement) et de l’univers à l’instant t2 (après le changement) .

Un instant n’est donc pas autre chose qu’un état exhaustif de l’univers.

l Supposons maintenant un univers comme le nôtre où les changements d'états sont souvent continus et partiellement prévisibles , comme la chute d'une pierre , la course du soleil ou la vibration d'un atome .

S'il était possible de placer un appareil photographique devant chaque grain de matière , de coordonner leur déclenchement et de composer leurs clichés pour obtenir une photo de l'univers en entier , privée de toute dimension temporelle , on obtiendrait une assez bonne image de l'instant .

Si l'on remplaçait les appareils photographiques par des caméras on pourrait filmer l'histoire de l'univers et il suffirait de faire un arrêt sur image pour caractériser un instant .

Mais les images obtenues par un tel procédé sont virtuelles, en ce sens que si deux observateurs essaient de s'accorder sur la définition d'un instant , ils ont de l'univers des images différentes par le seul fait que , même s'ils sont très proches dans l'espace, la lumière qui les informe de l'avènements des états, accomplit son trajet jusqu'à eux en des temps légèrement différents . Cette très légère différence n'est pas gênante lorsqu'on observe la situation du soleil , mais il en va autrement si l'on observe la vibration rapide d'un atome .

Ceci - dit , cela n'est qu'un léger handicap si les deux observateurs savent que pour caractériser un instant , il leur faut introduire des corrections en fonction de la distance qui les sépare des phénomènes observés .

Dans le contexte d'un univers en perpétuel changement  , il est évidemment impossible de relier un instant à la totalité des états qui le composent mais il suffit, pour le caractériser,  de le relier à un état particulier d’un dispositif particulier dont la configuration change en permanence . 

Parmi ces dispositifs , certains sont à états reproductibles , ce qui signifie qu’après qu’un état E se soit produit, on est certain d’assister à au moins un changement d’état suivi de la reproduction de l’état E .

 

 Dans l’ensemble D des dispositifs à états reproductibles , on va maintenant définir le sous -ensemble Dp des dispositifs périodiques, stable pour les trois propriétés suivantes :

1 Pour chaque dispositif  de Dp, tous les états sont reproductibles dans un ordre donné, invariant.

2 Quels que soient les dispositifs D1 et D2 de Dp ils vérifient la propriété suivante:

Choisissons un instant initial I0 pour lequel D1 est dans un état particulier (A) et D2 dans un état arbitraire (B).


Laissons D1 et D2 changer d'état au moins une fois et faisons un arrêt sur image à l'instant I1 quand D1 et D2 retrouveront simultanément, pour la première fois, leur état de l'instant I0. Entre I0 et I1, D1 aura changé d'état n fois et D2 aura changé d'état p fois. A partir de là il est simple de définir les dispositifs périodiques:

Si entre deux instants consécutifs où D1 retrouve l'état A et D2 l'état B les nombres n et p de changements d'états constatés pour chaque dispositif sont constants c'est que les dispositifs sont périodiques.

On peut inverser le rôle des dispositifs D1 et D2, les conclusions seront toujours les mêmes et si on se borne aux expériences où D1 et D2 retrouvent leur état initial simultanément (D1 dans l'état A et D2 dans l'état B en In) le rapport  n/p reste constant.

 

Exemple : sur le schéma ci – contre à 9 oscillations du pendule correspondent 3 tours du dispositif tournant.

 

 La 3eme propriété que doivent vérifier les dispositifs périodiques est la suivante :


3 La relation entre n et p reste identique quand on déplace l’un des dispositifs d’une distance quelconque par rapport à l’observateur dans un univers euclidien .Cette dernière condition permet de faire varier la phase à l’origine des dispositifs sans qu’il soit question de temps puisque l’éloignement a pour effet de rallonger le trajet des rayons lumineux et donc d’accroître le décalage entre l’image du dispositif et son état réel à un instant donné .

Cela signifie que même si je choisis pour D2 un état initial B différent de celui qu’il avait au début de l’expérience précédente, pendant que D1 retrouvera n fois l’état A, D2 retrouvera toujours p fois l’état B.

 

 Si ces trois propriétés ne sont pas vérifiées pour un couple de dispositifs , c’est que l’un d’eux est un intrus et il faut l’exclure du sous ensemble Dp après avoir vérifié duquel il s’agit . La propriété définit donc le sous-ensemble qu’on appelle ensemble des dispositifs périodiques .

.

 Réexaminons la démarche logique qui débouche sur la notion de temps :

l On a d’abord défini l’instant comme un état de l’univers perçu par un observateur

l on a ensuite défini les dispositifs périodiques comme un ensemble où le dénombrement des états de la totalité des dispositifs, entre deux instants déterminés par les états de l’un d’eux ,obéit à une loi numérique constante.

l Ensuite , on a pu compter les états identiques d’un dispositif périodique (individuellement ou en groupes équipotents d’états identiques consécutifs) pour donner au temps une structure d’abord semblable à celle des entiers naturels . Puis, par prolongement et divisions successives des intervalles, on l’a doté d’une structure semblable à celle des nombres réels . Cette façon de procéder nous a permis de faire correspondre un instant à chaque temps et un temps à chaque instant .

Enfin , nous avons défini la durée entre deux instants comme la différence des temps qui les caractérisent .

On pourrait obtenir un ensemble tout aussi cohérent en choisissant de définir la durée avant le temps.

 

Relativité de l'appréciation du temps

 

Maintenant que les choses sont claires , et le vocabulaire précis , revenons au concept d’instant pour essayer de comprendre la notion de temps relativiste .

Voir un objet , c’est percevoir la lumière qu’il émet et il s’écoule donc un temps non nul entre le moment où il émet la lumière qui caractérise son image et le moment où nous la reconstituons sur notre rétine . Par exemple on sait que la lumière met 8 minutes pour nous parvenir du soleil (que l'on suppose pour l'instant immobile et doté en surface d'une accélération égale à g) . Si je synchronise deux horloges et que j’en envoie une sur le soleil (avec une andalouse armée d’un éventail pour éviter que la mécanique ne s’échauffe) , quand je recevrai sur terre une image de l’horloge solaire indiquant 12h00 , il sera en réalité 12h08 sur celle qui n’aura pas quitté la terre .

Peut - on dire pour autant que l’instant où il est 12h08 sur la terre correspond à celui où il est 12h00 sur le soleil ? Non : un observateur terrestre peut caractériser cet instant en disant qu’il lit 12h00 sur le soleil alors qu’il est 12h08 sur la terre , mais un observateur solaire dirait au même instant qu’il est 12h08 sur le soleil alors qu’il lit 12h00 sur la terre .

L’instant est une notion universelle puisque nous l’avons défini comme un état de l’univers mais nous ne percevrons la réalité de cet état que lorsque les images qui le caractérisent parviendront jusqu'à nous , c’est à dire avec un retard d’autant plus important que le point observé sera lointain .

 

Se synchroniser , c’est faire correspondre la même heure au même instant . Pour deux observateurs éloignés, cela n’est possible qu’en prenant en compte les distorsions résultant de la distances . Si un observateur solaire veut se synchroniser par rapport à un observateur terrestre , il doit avancer sa montre de 8 minutes par rapport à l’heure qu’il lit sur terre . Par contre , si un observateur solaire veut mesurer la durée d’un phénomène , il trouvera la même valeur , que le phénomène se déroule sur terre ou sur le soleil , qu’il utilise l’horloge terrestre ou l’horloge solaire , que ces deux horloges soient synchronisées ou non .

On va voir maintenant que cela n’est vrai que parce que le soleil est supposé immobile par rapport à la terre .

 

Dans un contexte relativiste , c’est à dire lorsque l’un des observateurs est animé d’un mouvement de translation uniforme par rapport à l’autre , on va découvrir que la durée d’un phénomène paraît différente selon qu’il est observé depuis le repère où il se déroule ou depuis l’autre repère, ce qui traduit que le temps ne s’écoule pas de façon identique dans les deux repères . 

 

Partant de là, il est à peu prés évident que dés lors qu’on touche à l’un des piliers de la connaissance, le temps, d’autres grandeurs ne seront pas épargnées . Les abscisses , les longueurs , l’énergie, les masses, les champs électriques et magnétiques et une foule d’autres valeurs vont passer à la moulinette relativiste ,  et devront être recalculées en fonction du repère qu’on choisira comme référence .

Les vitesses bien sûr ne seront pas laissées pour compte , à l’exception d’une seule , celle de la lumière qui selon l’expérience de Michelson - Morey est indépendante du repère d’évaluation .

Cette spécificité fait de la lumière le trait d’union entre les observateurs , la clé des formules qui permettent de passer d’un univers à un autre .

 

Il n’est pas difficile , en partant des hypothèses d’Einstein , de retrouver mathématiquement ces formules . Elles découlent d’une relation relativement simple qu’on appelle transformation de Lorentz (en réalité, elle serait dûe à Poincaré). Mais il est autrement compliqué d’en appréhender le sens profond , la réalité physique .

 

La transformation de Lorentz

Imaginons deux repères galiléens en translation l'un par rapport à l'autre .

 

Normalement , le vecteur vitesse définissant la translation des repères est quelconque .

Pour simplifier nous allons considérer le cas où l'axe O'x' de R’ glisse sur l'axe Ox de R à vitesse constante v, ce cas de figure permettant de résoudre, à lui tout seul, de nombreux problèmes .

         Pour comprendre en quoi un contexte relativiste diffère d'un contexte non relativiste , il suffit d'imaginer deux observateurs situés l'un en O et l'autre en O' . Chacun d'eux est lié à son repère et lorsque les points O et O' coïncident , le point O émet un photon (un rayon lumineux) en direction de x .

En mécanique traditionnelle , l'observateur lié à R , supposé immobile , voit le photon s'éloigner à la vitesse C et l'observateur lié à R' qui poursuit le photon à la vitesse v , le voit s'éloigner moins vite , à la vitesse C - v  .

En mécanique relativiste , les deux observateurs voient le photon s'éloigner à la vitesse C .

Mais si le point O émet un projectile quelconque , autre qu'un photon , au moment où il coïncide avec O' , les deux observateurs ne le verront pas s'éloigner pour autant à la même vitesse .

Seule la lumière présente cette spécificité et on verra que cette spécificité fonde la relativité.

Autre curiosité : dans les deux systèmes, les observateurs sont d'accord pour dire qu'ils s'éloignent l'un de l'autre à la vitesse v, depuis l'instant 0 ou les origines coïncidaient . En mécanique traditionnelle , s'ils évaluent la distance qui les sépare l'un de l'autre à l'instant t, ils trouveront la même valeur: vt . En mécanique relativiste, ce ne sera pas le cas , tout simplement parce que les temps ne s'écoulent pas de façon identique dans les deux repères . L'un trouvera vt et l'autre vt' , deux valeurs calculées à partir de temps différents .

Nous allons voir maintenant qu'il est très facile de retrouver les formules de la relativité .

 Un point M de l'univers est repérable aussi bien dans R que R'.

Il est évident que si l'on veut évaluer l'abscisse x' de M dans le repère R' en fonction de l'abscisse x de M dans le repère R , il faut faire intervenir le temps qui modifie la situation d'un repère par rapport à l'autre . Si l'évaluation est faite depuis R , ce temps est noté t .  x' est une fonction de x et de t : x' = f(x , t).

Si l'évaluation est faite depuis R' (temps t') on a x = g(x' , t') .

On en déduit que t et t' sont des fonctions de x et x' et donc que

t ' est une fonction de x et de t , ce que l'on note t' = h(x , t) .

 


On va voir maintenant qu'il suffit de formuler deux hypothèses banales pour réduire en poussière la mécanique classique et découvrir le monde étrange de la relativité .

La première hypothèse d'Einstein est que tout mouvement rectiligne uniforme dans un repère doit être rectiligne uniforme dans l'autre .

Ceci implique que les fonctions f , g et h sont linéaires , c'est à dire de la forme

x'=ax+bt  et   t'=Ax+Bt où a,b,A,B sont des constantes .

Comme par ailleurs on sait que x(O')=vt et x'(O)=– vt' , il vient – vt'=bt avec t'=Bt .

Soit – vBt=bt ou – vB=b

De x’(O’)=0 ou encore ax+bt=0 on déduit x=– bt/a et comme x=vt on obtient b= – av   d'où a=B .

 

La deuxième hypothèse est que la vitesse de la lumière est constante dans les deux repères .

    Donc , si au temps 0 , O emet  une onde lumineuse sphérique , dans chaque repère , la mesure du rayon de la sphère aux temps correspondants t et t' donnera :  y²+z²+x²=c²t² et y'²+z'²+x'²=ct'² ce qui d'aprés les égalités y=y' et z=z' nous permet d'affirmer que x²-c²t²=x'²-c²t'²

Or d'aprés les résultats précédents x²-c²t²=(ax-avt)² - c²(Ax+at)² .

En identifiant les coefficients de ces polynômes , on trouve :

 


Grâce aux mathématiques on retrouve donc facilement les formules de la transformation de Lorentz :          

 


Un point M de l’univers est doté dans le repère R d’une abscisse x et d’un temps t et dans le repère R’ (pour un observateur de R’) d’une abscisse x’ et d’un temps t’ . Pour trouver x et t en fonction de x’ et t’ , il suffit de remplacer dans les formules v par -v (g reste identique) et d’intervertir x et x’ , t et t’ .

En mécanique classique , la lumière aurait une vitesse différente de c pour celui des observateurs qu’on considère en mouvement et les équations de correspondance seraient x’ = x - vt et t = t’ .

 

En mécanique relativiste , il n’existe pas de repère absolu , ce qui veut dire que l’immobilité n’a de sens que dans l’un des repères . Vu depuis R , O semble immobile et O’ en mouvement , mais depuis R’ , c’est tout le contraire : O’ semble immobile et O en mouvement . La vitesse de la lumière est constante dans les deux repères. Les formules de correspondance de la mécanique classique sont déformées notamment par l’application d’un facteur g qui est de toute façon >= 1, très voisin de 1 tant que v est petit devant c mais peut devenir très important lorsque v tend vers c. 

 

Repère propre , repère impropre .

 

 

Retenons que la multiplication par g est un facteur d’agrandissement .

 

Quand on observe un phénomène , par exemple l’oscillation d’un pendule, on utilise en général un repère dans lequel le portique supportant le pendule , l’horloge qui nous permet de déterminer sa période et l’observateur lui même occupent des positions fixes .

On dit qu’il s’agit d’un repère propre , le plus souvent lié à la terre .

Si l’on embarque le pendule dans un avion en mouvement uniforme , pour retrouver des conditions analogues, il faut embarquer aussi l’horloge et l’observateur  . Ou, en d’autres termes , c’est l’avion qui devient un repère propre .

Mais que se passe - t’il si ayant embarqué le pendule à bord de l’avion , on l’observe depuis le sol , c’est à dire depuis un repère impropre avec une horloge elle aussi liée à la terre ?

La relativité répond que les conclusions d’un observateur lié au repère impropre seront différentes des conclusions d’un observateur lié au repère propre : les distances , les durées , les vitesses , les masses (...) ne seront pas évaluées par les mêmes nombres et l’un des objets de cette théorie est de déterminer quelle est la loi permettant de faire correspondre les deux types d’évaluation .

Des transformations de Lorentz , on déduit assez facilement quelques conclusions .

Notamment ,

depuis un repère impropre :

 

l Les durées sont dilatées : Dt = gDt0

 

l Les distances sont contractées Dx=1/g Dx0

 

Repères, distances et durées dans l’expérience de Michelson - Morey

 

Situons nous d’abord dans le repère propre , qui est un repère lié à la terre puisque l’appareil est solidaire de la terre .

Pour que le rayon rouge et le rayon bleu, issus de S en phase, arrivent en phase sur F , où est situé l’interféromètre, il faut que les temps de parcours SOVOF et SOHOF soient égaux .

Les temps de parcours étant visiblement égaux sur SO et sur OF , il faut qu’ils le soient aussi sur OHO et OVO .

Ces temps sont respectivement 2.OH/C et 2.OV/C .

Cela implique que OH = OV = d. Dés lors, le temps de trajet sur OHO ou sur OVO , est t0 = 2d0 /C .

 

Quand on opère une rotation de 90° autour de O , la branche OH devient verticale et la branche OV devient horizontale , mais l’égalité des trajets persiste . Les rayons continuent d’arriver en phase sur l’interféromètre .


Lorsqu’on se situe dans le repère impropre (l’espace)

 

Verticalement , les miroirs sont entraînés à la vitesse v par le mouvement de la terre .


La longueur de la branche verticale (perpendiculaire au mouvement) n’a pas changé . C’est toujours d0 .


Par contre , le trajet du rayon rouge est vu comme une droite oblique .

En effet , il est confondu avec la branche OV , mais comme celle - ci se déplace à la vitesse v de la terre , un photon s’élève vers V puis redescend vers O en se déplaçant horizontalement , ce qui donne un trajet oblique.

 

Si t est le temps de trajet OVO et t1 le temps de trajet OV , on a  t = 2t1 et  (Ct1)2 = d02 + (vt1)2 (Pythagore appliqué au triangle rectangle) .

On en déduit que t = g2d0 / C   ou , comme 2d/ C = t :

  t = g t0 (c’est la loi de dilatation des durées) .

 

Horizontalement , vu depuis l’espace , le rayon bleu semble poursuivre le miroir H animé de la vitesse v . Puis quand il se réfléchit sur H , il se dirige vers le miroir O qui va à sa rencontre à la vitesse v

Si d est la longueur de la branche OH , si t est le temps de l’aller et t2 le temps du retour, l’opérateur voit le rayon lumineux horizontal parcourir une distance d + vt1 avant de frapper le miroir H puis une distance d - vt2 avant de revenir sur le miroir O .

Il trouve que

t1 = (d + vt1) / C   et    t2 = (d -vt2 ) / C   d’où il déduit que t1 + t2 = t = 2gd / C .



Or , puisque les rayons bleu et rouge sont en phase quand ils arrivent en O après des trajets différents , ce temps t est le même que celui que nous avons calculé précédemment, soit t = g2d0 / C .En éliminant t , on retrouve la loi de contraction des longueurs :  d = d0 / g


Evidemment , en mécanique classique , un tel résultat serait impossible car le postulat OH = OV (égalité des bras horizontaux et verticaux et constance de leur longueur dans les deux repères) entraînerait une inégalité des temps de trajets pour le rayon bleu et le rayon rouge et il leur serait impossible d'arriver en phase sur l'interféromètre .

 

D'après Michelson - Morey , l'égalité des temps de trajets signifiait que OV = g OH , ce qui fait que lorsque OV devenait horizontale et OH verticale , les temps de trajets devenaient différents et cela devait se traduire par une déplacement de la raie centrale de l'interféromètre .

En mécanique classique , la constance de OH dans les deux repères se traduit par la constance de X2+Y2+Z2 , si X, Y , Z sont les composantes du bipoint (O,H) . (d, 0 , 0) devient (0, d, 0) quand on bascule l'appareil .

En mécanique relativiste , ce n'est pas X2+Y2+Z2 qui est constant mais X2+Y2+Z2 -(Ct)2 , ce qu'on peut vérifier en étudiant les trajets 0V et OH dans les deux repères .

X2+Y2+Z2 est le carré de la distance entre deux points et Ct , la distance parcourue par la lumière pendant le temps t .

 


 GENRE DES EVENEMENTS


Si l'on définit deux événements dans un repère par leurs coordonnées (x1 ,y1 ,z1 ,t1 ) et (x2 ,y2 ,z2 ,t2 ) et qu'on pose X=(x1-x2) , Y=(y1-y2) ,

Z=(y1-y2), CT=C(t1-t2, la quantité X2+Y2+Z2 - (CT)2 est appelée distance entre les événements .

 Cette distance ne varie pas quand on observe les événements depuis un autre repère galiléen .

Si elle est nulle , on dit que les événements sont de genre lumière, si elle est positive on dit qu'ils sont de genre espace et si elle est négative , on dit qu'ils sont de genre temps .

Par exemple , dans l'expérience de Michelson - Morey , on peut étudier les événements

départ d'un photon de O et arrivée du même photon sur V ou H .




Selon le cas on a :

l Verticalement

d0 = ct ( R ) ou (ct)2 = d02 + (vt)2 .(R') , les événements ayant pour coordonnées (0,0,0,0) et (0,d0,0,t) dans R ou (0,0,0,0) et (vt,d0,0,t). La distance est nulle dans les deux repères.

l Horizontalement

d0=ct ( R ) ou ct = d+vt , les événements ayant pour coordonnées (0,0,0,0) et (d0,0,0,t) dans R ou (0,0,0,0) et (d+vt,0,0,t) dans R' .

Là encore , la distance est nulle dans les deux repères .

 

Ces événements sont donc de genre lumière .On pouvait s'y attendre du moment que les phénomènes observés sont des déplacements de photons . Si deux événements concernent le trajet de rayons lumineux , ils sont de genre lumière et leur distance est nulle .

Si la distance des événements est positive , cela signifie que X2+Y2+Z2 >(CT)2. En supposant que l'événement Ea se produise au lieu A au temps ta et que l'événement Eb se produise au lieu B au temps tb > ta :

 

Les événements sont de genre espace si, lorsque Eb se produit, l'image de Ea n'a pas eu le temps de parvenir  en B. 

Ils sont de genre temps si lorsque Eb se produit , l'image de Ea a dépassé B .

ils sont de genre lumière si , lorsque Eb se produit l'image de Ea arrive justement en B .

 

Par exemple , sur terre , si l'on prend pour lieu A le pôle sud , pour lieu B le pôle nord et qu'on creuse un tunnel pour aller de A en B , sa longueur sera maximale et d'environ 12000 km . Le temps mis par la lumière pour aller de A en B est de 12000/300000 soit 4 centièmes de seconde . Si les points A et B sont plusrapprochés , ce temps diminue .

On en déduit que sur terre, tous les événements se produisant à plus de 0,04 s d'intervalle sont de genre temps . C'est généralement le cas à l'échelle humaine .

Par contre , à l'échelle astronomique , on peut observer couramment des événements de genre espace et de genre temps.

On va voir que le genre des événements relativise les adjectifs "simultanés" , "antérieurs" ou "postérieurs" qu'on emploie pour les caractériser . Considérons les événements décrits dans le schéma suivant :

 

 La lumiére met moins de 0,05 secondes pour aller de A à B .

Donc, quand Eb se produit, l’image de Ea a déjà dépassé le point B .

En conséquence, les 3 observateurs P, Q, R, quelle que soit leur localisation,  voient toujours Ea se produire avant Eb.

 

 

 

Cette fois, la lumière met plus d’une seconde pour aller de A à B. Donc …

P verra  Ea se produire avant Eb.

R verra Eb se produire avant Ea

Quant à Q , tout dépend de sa situation sur AB .

Si AQ=1.650.000 Km les 2 événements lui paraîtront simultanés.  Sinon, il épousera le point de vue soit de P, soit de R.

 

Après avoir examiné les événements de tous les genres dans le référentiel propre R, il est intéressant de les observer depuis un référentiel impropre R'. Les formules de Lorentz nous permettent de calculer les coordonnées spatiales des événements et les temps où ils se produisent dans R'

 

 

 

 

 

 

 

 


Dans R' , la distance des événements X2+Y2+Z2 -(CT)sera conservée .

En supposant que les coordonnées Y et Z sont nulles dans les deux repères

(ce qui ne change rien à l'affaire) , on trouve les relations suivantes :

X'=g(X-VT)  et T'=g(-VX/C2 + T)

 

L'égalité des distance entre événements devient D= X2 -(CT)2 = X'2 -(CT')2.

En choisissant judicieusement V (en évitant V>C) , il existe donc un repère R' où X' est nul et, dans d'autres conditions , un autre repère R' où T' est nul .

 

L'image d'un événement naît au moment où il se produit et se propage dans toutes les directions à la vitesse de la lumière . L'ensemble des lieux où l'on peut trouver l'image de l'événement à un instant t postérieur à son avènement est une sphère dont le rayon grandit à la vitesse C et qu'on appelle "sphère image" .

 



l Si l'on choisit deux événements de genre temps (D < 0) , ils seront aussi de genre temps dans R' , ce qui impose que T' ne puisse être nul .

Imaginons la sphère image de l’événement jaune et celle de l’événement rouge qui grosssissent à la même vitesse dans notre univers, notre repère R .

La sphère image du dernier événement produit sera toujours incluse dans la sphère image du premier événement produit.

L'apparence de simultanéité est impossible .

 

Par contre , il nous est possible de choisir un référentiel R' dans lequel

X'=(x- x2)= 0 ce qui veut dire qu'on voit l'événement rouge et l’événement jaune se produire  au même endroit , l'un après l'autre (alors que dans notre univers  ils sont distants de AB).


 

l Si l'on choisit deux événements de genre espace (D > 0) dans R , ils seront aussi de genre espace dans R' , ce qui impose que X' ne puisse être nul .

 

Les sphères images auront toujours une intersection non vide d'où un observateur pourra voir les événements se dérouler simultanément sans qu'ils se déroulent au même temps .




Par contre , on peut choisir un référentiel R' où T' = (t- t2) = 0

Deux événements qui n'étaient pas simultanés au sens strict dans R , le deviennent dans R' . Dans R' , au contraire de ce qui se passe dans R, les deux événements se produisent en même temps .

Etonnant , non ?

 

Nous découvrons à quel point notre perception des phénomènes peut être affectée par un déplacement  et comment temps et espace interfèrent dans la construction de cette perception. La notion d'espace - temps vous paraît elle plus concrète après que nous ayons démontré que la perception de deux événements dépend du signe de leur distance relativiste et donc d'un compromis entre leur distance spatiale et leur distance temporelle ?

Mais nous ne sommes pas au bout de nos surprises avec la relativité .

Intéressons nous maintenant à l'assertion selon laquelle les temps sont différents dans deux repères galiléens.

 

Les distorsions du temps

L'expérience de Michelson - Morey suffit à expliquer la dilatation des durées , qui  paraissent g fois plus grandes quand elles sont mesurées depuis un repère impropre .

Mais comment expliquer la mystérieuse formule de correspondance des temps : T = g ( T' - VX'/C2)  ?

 

On va supposer l'horloge de R fixe en O et , pour débuter , on va situer celle de R'

en O' .

On a vu qu'on avait des difficultés à synchroniser des horloges distantes mais fixes dans l'espace , quand de plus elles sont mobiles , l'une par rapport à l'autre , cela tient du casse tête .

Aussi , on va procéder quand O et O' coïncident et caractériser cet instant par

T = T' = 0 .

Qu'en est - il un moment plus tard quand O' a bougé par rapport à O, la valeur des horloges étant T=t et T'=t'.

 

 

 Choisissons les événements "H' indique 0" et "H' indique t' " .

Leur distance dans R est (vt,t) - (0,0) soit (vt)2 - (Ct)2 et dans R'  : (0,t') - (0,0) soit -(Ct')2 .

L'égalité de ces distances débouche sur t = gt' . La correspondance des temps est donc T = g T' .

 

Par contre , si l'on suppose l'horloge de R'  en P (d'abscisse x' ), imaginons deux observateurs situés en O' essayant de synchroniser leurs horloges h et h' en lisant H' .

La lumière met un temps X'/C a parcourir la distance PO' et durant ce trajet les horloges h et h' se sont éloignées de VX'/C .

Pour parcourir ce trajet supplémentaire , la lumière mettra un temps DT'=VX'/C2.

Donc , quand on synchronise h sur H' , on commet une erreur DT' par rapport à h' . Erreur qu'on ne commet pas quand H' est en O' .

Lorsqu'on la corrige , on estime que le temps de h' est T' - VX'/C2, et il faut multiplier cette valeur par g pour trouver le temps T de R .

 

C'est donc une autre bizarrerie de la relativité : le temps ne s'écoule pas de la même façon dans les deux repères .

 

Nous avons vu l'histoire de ces particules , les mésons mu , qui parviennent à nous , sous forme de rayons cosmiques , depuis le tréfonds de l'espace , alors que leur durée de vie très courte selon la mécanique classique ne devrait pas leur permettre de parcourir plus de 0,69 km , même s'ils se déplaçaient à la vitesse de la lumière . Pour résoudre cette énigme , il suffit de considérer qu'aux grandes vitesses , le temps s'écoule plus lentement , ce qui leur permet de parcourir un trajet plus long (par exemple depuis la couronne du soleil ou la magnétosphère d’une planète qui ne sont pas autre chose que des accélérateurs de particules) .

 

Langevin , un savant qui a beaucoup œuvré pour propager la relativité en France , a même développé le paradoxe d'un voyageur qui effectuant un voyage éclair de la terre à la lune à très grande vitesse, vieillirait moins vite que son frère jumeau , resté sur terre . Mais pour développer ce paradoxe , il semble qu'il faille négliger les phases d'accélération et de décélération qui nous transportent du cadre de la relativité restreinte (mouvement de translation des repères) à celui de la relativité générale (mouvement uniformément accéléré) .

En réalité , ces phases jouent un rôle déterminant .

 

De la relativité restreinte  à la relativité générale

 

La relativité générale nous apprend que la masse , la gravitation ou plus généralement l'accélération déforment elles aussi le temps . Tout se passe comme si , soumise à un champ de gravitation intense , une horloge ralentissait .

Le décalage vers le rouge (augmentation de longueur d'onde et baisse de fréquence) de la lumière émise par les étoiles massives en est un exemple .

 

Sans la phase d'accélération , le voyageur de Langevin , qui verrait son jumeau resté sur terre s'éloigner à la même vitesse que celle qui lui est conférée , en déduirait que sa propre horloge est plus rapide que celle de son frère (principe de réversibilité) . Mais ce raisonnement n'est valable que si les mouvements sont exclusivement uniformes.

Lorsqu'il reçoit une accélération qui l'amène de la vitesse de la terre à sa vitesse propre , la relativité nous apprend que le voyageur "change de ligne d'univers " .

Tout se passe comme si c'était pendant cette phase , extrêmement brève dans les hypothèses de Langevin , que son temps changeait de nature et que sa montre se mettait à battre plus lentement , sa physiologie et tout son univers se mettant à son diapason. Rien de pareil ne se produit pour son jumeau resté sur terre.

D'ailleurs, nous savons que le voyageur est le seul à sentir les fameux effets de l'accélération qui le collent à son siège et lui nouent les tripes.  Et quand il décélérera , au moment de son retour , sa montre réintégrera l'univers terrestre et retrouvera son rythme initial , mais elle retardera , comme prévu,  à cause de l'effet relativiste rapporté à la durée du voyage .

 

 

En 1971 , les américains synchronisèrent trois horloges atomiques .

Ils en laissèrent une à terre et embarquèrent chacune des deux autres à bord de deux avions supersoniques dont l'un partait vers l'est et l'autre vers l'ouest . A l'arrivée , ils purent constater que l'horloge embarquée vers l'est avait perdu 273 nanosecondes sur celle restée à terre , tandis que l'horloge embarquée vers l'ouest avait gagné 59 nanosecondes.

On peut admettre que , la terre tournant sur elle même vers l'est , pour atteindre la même vitesse par rapport à la terre, l'avion décollant vers l'est doit fournir une accélération plus importante que celui qui décolle vers l'est .

 

Si vous voulez gagner un millième de seconde sur le temps qui vous est imparti , il suffit de vous embarquer dans un avion et de voler à 1000 km/h pendant 60 ans , en choisissant la bonne direction .

Si la solution de l'avion vous paraît repoussante , il en existe une autre , bien plus élégante : mettre une étoile à neutrons dans votre jardin ou un trou noir dans votre frigo .

Il y en a de tout petits et bien massifs qui feraient pâlir votre voisin de jalousie . Mais ils sont chers .

 

 


 

Tout cela vous donne mal à la tête .

 

Vous aimeriez que les choses soient plus simples  ?

Une montre dont le cadran se résume à quatre indications : métro , boulot , télé , dodo ?

Un calendrier réduit à une pierre tombale avec les dates de votre naissance et de votre

mort ?

Une vie qui ressemble à un horaire de trains ?

Sans effort , sans secousse , sans douleur , sans fugue , sans folie ?

 

Pourtant , la complexité même du monde , est à l'origine de sa beauté .

Une fleur , par exemple , le plus humble des cadeaux que nous offre la vie : ne la regardez pas comme une simple touche de couleur dans un univers de grisaille.

Elle est beaucoup plus que ça ,

On  l'aime mieux quand on la comprend mieux , quand on la regarde comme un être vivant, quand on sait sa soif et sa faim, les efforts qu'elle déploie pour séduire les insectes  , l' alchimie miraculeuse qui a conduit à sa beauté , sa souffrance d'avoir dû renoncer à la vie anonyme qu'elle menait au bord d'un chemin pour contribuer au bouquet éclatant qui orne votre salon.

 

Il est un point où la connaissance devient poésie , musique , émotion .

 

L'émotion , ce frisson sucré d'où jaillit la lumière , ce coeur qui bat plus vite pour nous rappeler l'éphémère beauté de l'existence , ce raccourci fulgurant entre le monde et nous .

 

Alors  surtout , surtout , n'oubliez pas de lever les yeux au ciel .